Entretien #15 – Thylacine
Amnusique revient aujourd’hui avec un 15ème entretien dédié, cette fois-ci, à Thylacine, un producteur de musique électronique en pleine ascension, originaire d’Angers. Le jeune artiste, âgé de seulement 23 ans, a accepté de se livrer sur « Transsiberian », un concept-album hors du commun, qu’il a dévoilé en novembre dernier sur son label Intuitive Records. Pendant deux semaines, William aka Thylacine a parcouru 9280 kilomètres dans les wagons du célèbre train « Transsiberian » afin de découvrir la Russie en long, en large et en travers. De ce voyage est né un album de 10 morceaux, retraçant les moments forts de cette aventure humaine et musicale inédite. Thylacine a accepté de nous dévoiler les dessous de ce projet ambitieux, à mi-chemin entre l’album Berlin Calling de Paul Kalkbrenner et l’émission Rendez-vous en terre inconnue.
Interview réalisée avec Thylacine :
Amnusique :
Bonjour William, merci à toi de nous accorder un peu de ton temps. On va commencer par une question traditionnelle : peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaitraient pas encore ?
Thylacine :
Et bien, ça, on doit le retrouver un peu partout (rires). Je viens d’Angers, j’ai commencé la musique assez jeune avec l’apprentissage du saxophone vers 5 ou 6 ans, donc une formation classique. Je suis également passé par le conservatoire et par de l’orchestre. Je suis arrivé à la musique électronique un peu tardivement, il y a à peu près 5 ans, de par ma volonté de composer un peu tout seul, de faire quelque chose de plus approfondi, quelque chose qui me plaise vraiment. Je ne viens pas tellement, voire pas du tout en fait, de la culture électronique à la base mais c’est la liberté qu’il y avait dans celle-ci qui m’a intéressé.
Amnusique :
Après avoir sorti quelques singles et EP par-ci par-là, tu as publié, en novembre 2015, ton premier album « Transsiberian », entièrement composé dans le train du même nom qui rallie Moscou à Vladivostok. Tout le voyage a été filmé et a donné lieu à une web-série de 10 épisodes. Peux-tu nous dire si c’est toi qui as eu cette idée de concept-album et, si oui, comment t’est venue cette idée un peu folle ?
« Il me manquait quelque chose. Il fallait que je puisse me nourrir de gens, de rencontres, de découvertes et de paysages »
Thylacine :
Effectivement, c’est bien moi qui ai eu l’idée, il y a environ deux ans de cela. J’aime bien composer un peu partout, notamment dans le train, qui est un endroit qui réunit énormément de facteurs intéressants pour travailler. Je me suis aussi rendu compte qu’en étant enfermé dans un studio, loin de tout, je n’étais pas forcément très efficace. Il me manquait quelque chose. Il fallait que je puisse me nourrir de gens, de rencontres, de découvertes et de paysages.
J’ai un ami qui avait pu prendre le Transsiberian il y a quelque temps et qui m’en avait parlé. J’ai vite compris que ce serait pour moi LE studio idéal. J’avais envie de monter un projet qui ne serait pas uniquement musical. Je voulais que ce soit un vrai gros projet, avec une vraie histoire. Je me suis donc lancé, j’ai monté des dossiers et frappé à des portes pour essayer de motiver des gens. Ça a été assez long mais, petit à petit, je suis parvenu à monter une équipe, à trouver de l’argent pour cela et à partir.
Amnusique :
Alors justement, peux-tu nous présenter un petit peu l’équipe de choc qui t’a accompagné pendant ton expérience ?
Thylacine :
Nous étions 5. Il y avait le réalisateur, David Ctiborsky, qui bosse régulièrement avec la Blogothèque, Vincent Ribaud, l’ingé son, qui s’occupait de toute la partie vidéo et qui m’épaulait aussi sur des enregistrements sonores. Il y avait également Pauline Narychkina, notre traductrice et interprète Russe, qui nous permettait de traduire et de faciliter le contact avec les gens que l’on rencontrait sur place. Et puis, pour terminer, il y avait Catherine Grel, notre directrice de prod’ qui chapeautait toute la partie technique et le voyage.
Amnusique :
Tout ce petit monde dormait-il avec toi dans le train ?
« C’est vraiment un truc que l’on a vécu à 5, les autres ont vécu exactement les mêmes choses que moi »
Thylacine :
Oui, on avait tous nos petits wagons ! Dans ces wagons, il y avait deux lits collés, mais avec tout mon bordel il n’y avait plus de place (rires). Mais oui, ils étaient à côté de moi. C’est vraiment un truc que l’on a vécu à 5, les autres ont vécu exactement les mêmes choses que moi.
Amnusique :
Concernant le financement d’un tel projet, comment procède-t-on ? On a pu voir que France Télévisions y avait participé d’ailleurs ?
Thylacine :
Tout à fait, ils ont financé une bonne partie du projet, et de mon côté, j’ai réussi à motiver mes éditeurs à mettre un peu la main au portefeuilles. On a aussi réussi à avoir quelques subventions de la SACEM, du CNC… C’est avec toutes ces contributions qu’on a réussi à concrétiser le projet.
Amnusique :
On suppose que c’est plutôt onéreux de lancer un projet comme celui-ci ? Ce n’est pas juste se payer un billet de train…
Thylacine :
Oui, c’est quelque chose qui coûte quand même une certaine somme. D’autant plus que ça a été vraiment fait dans de très bonnes conditions. Il y avait quand même une équipe de 5 personnes à faire bosser pendant plus de deux semaines.
Amnusique :
Comment se prépare-t-on à ce type d’aventure ? Chaque détail est-il prévu à l’avance ?
« Trois mois avant de partir, j’ai totalement arrêté de composer pour être plus frais »
Thylacine :
J’ai pas mal préparé le voyage. Il me vient une anecdote d’ailleurs ! Trois mois avant de partir, j’ai totalement arrêté de composer pour être plus frais, pour ne pas tomber d’emblée dans une fatigue, une lassitude, et dans le but de commencer dans le train avec une grosse motivation pour composer. J’y pensais depuis deux ans à ce projet, j’ai donc eu le temps de peaufiner énormément de détails. J’ai pu me préparer au moins un an avant. J’ai eu le temps de lire pas mal de livres, de me documenter et de m’habituer à composer de manière courte mais intensive.
Après, évidemment, il y a une grosse partie que tu ne peux pas du tout préparer. Ça ne sert à rien de vouloir tout contrôler, il faut se laisser porter par le truc. Il y a plein de choses que l’on n’avait pas prévues et on s’est laissés embarquer. Il y a des moments où je pensais que ça se passerait d’une façon et, finalement, ça s’est passé totalement autrement. C’était le but aussi.
Amnusique :
Selon-nous, cette expérience est un peu un mélange entre un « Rendez-vous en terre inconnue » et le film/album « Berlin Calling » de Paul Kalkbrenner pour le côté musical. Qu’en penses-tu ?
Thylacine :
Oui (rires), il y a un petit peu de ça ! C’est plutôt au fur et à mesure de l’aventure que ça l’est devenu en fait. Au départ, quand j’ai eu l’idée de ce concept-album, ce n’était pas du tout le cas. Mon but n’était pas du tout de faire un « Rendez-vous en terre inconnue », mais c’est vrai qu’après être rentré je me suis rendu compte qu’il y avait un lien fort avec cette émission. Ou même avec « J’irai dormir chez vous ». Au final ce sont des choses dont je suis assez proche et qui m’intéressent. Et le côté documentaire peut être effectivement mis en lien avec ce type d’émissions.
« J’ai essayé de me demander comment on pouvait avoir une autre écoute d’un titre, quand on connaît tout son contexte et l’histoire de sa création »
Réaliser ce Transsiberian c’était aussi l’idée de construire un projet qui ne soit pas juste un album. Un projet avec une histoire derrière. Ce qui m’intéresse c’est de présenter quelque chose en plus, avec une autre dimension. Quand tu écoutes l’un des morceaux de l’album, tu peux avoir des images et une histoire qui te viennent en tête. J’ai essayé de me demander comment on pouvait avoir une autre écoute d’un titre, quand on connaît tout son contexte et l’histoire de sa création.
Concernant Berlin Calling et Paul K, ils font carrément partie de ma culture et de ces films/artistes qui m’ont pas mal marqué dans ma vie. Il y a donc sûrement un peu de ça dans Transsiberian. Lorsque l’on me dit qu’il y a des sonorités de Paul Kalkrenner dans cet album, je ne me rends pas forcément compte, mais c’est une comparaison qui ne me dérange pas, bien au contraire (rires).
Amnusique :
Artistiquement ça doit être fort ce que tu as vécu, mais humainement parlant, tu as dû également en prendre plein la vue ?
Thylacine :
Carrément. C’est vraiment le rapport humain qui a porté le projet et qui m’a le plus surpris. On a été super bien reçus partout où on est allés et il y a eu un très bon accueil du projet. Tout le monde était motivé pour nous présenter des musiciens et nous emmener dans divers lieux. On nous a vite emmenés à droite et à gauche pour enregistrer. C’était assez fort. Et puis, pendant tout le voyage, on a rencontré des personnes hypers intéressantes et hypers chouettes, dont certaines que j’ai d’ailleurs encore en contact et avec qui je discute toujours maintenant. C’est vraiment fort, en si peu de temps, de rencontrer et d’échanger sur la musique, avec des gens qui ont un type de vie et une culture totalement différents de nous. C’était assez fort en émotion et c’est ce qui est, pour moi, le meilleur moteur pour composer.
Amnusique :
Quand tu es parti, toutes ces rencontres dont tu nous parles étaient déjà prévues ou ça s’est fait un peu par le biais du hasard ?
« C‘est le graffeur (Artemiy) qui nous a emmené dans le petit village pour nous présenter la chorale des petites dames, alors que ce n’était pas du tout prévu »
Thylacine :
Un peu des deux. Quelques rencontres étaient déjà prévues, notamment celle avec le graffeur ! On avait réussi à le contacter via son compte Instagram, où l’on avait trouvé des choses intéressantes dessus. Il y en avait quelque-uns comme ça. Pour celles non prévues, ça s’est fait au fur et à mesure. Par exemple, c’est le graffeur (Artemiy) qui nous a emmené dans le petit village pour nous présenter la chorale des petites dames, alors que ce n’était pas du tout prévu. On a essayé de prendre des contacts de base, histoire d’avoir un appui à chaque fois que l’on arrivait à un endroit, afin de nous faire rencontrer des gens. En général, on avait un temps assez limité dans les villes et villages. On avait juste deux ou trois jours pour faire plein de choses, donc on avait besoin d’un contact pour trouver les bonnes personnes à qui parler.
Amnusique :
T’étais-tu fait une petite idée sur les personnes que tu allais rencontrer ?
« C’est une grosse et bonne surprise d’avoir pu mêler toutes ces rencontres à mes morceaux. Musicalement c’est hyper fort »
Thylacine :
Déjà, je n’imaginais pas que je rencontrerais autant de gens. Je ne pensais pas non plus que j’utiliserais autant de voix sur les morceaux. Je m’étais dit que si j’arrivais à enregistrer, ne serait-ce qu’une voix de chanteuse, ce serait déjà cool. Mais, au final, sur la moitié des morceaux de l’album il y a de la voix ! C’est une grosse et bonne surprise d’avoir pu mêler toutes ces rencontres à mes morceaux. Musicalement c’est hyper fort.
Après, je ne m’étais vraiment pas imaginé faire autant de rencontres si « insolites ». Initialement on s’était mis en tête de rencontrer un Chaman mais on ne savait pas du tout si on allait y arriver. Ça a vraiment été plein de bonnes surprises pendant tout le parcours. Il y a eu pas mal de choses que l’on devait faire et, c’est vrai, que l’on a été vraiment chanceux. On a toujours réussi à rencontrer les bonnes personnes et à se faire embarquer dans l’aventure.
Amnusique :
Comme ça, on a l’impression que tout s’est bien passé pour toi, mais il y a forcément eu quelques petits couacs durant le voyage non ?
« On transportait des tonnes de matériel qui coûtait très cher et qui auraient pu être une source de gros problèmes… mais on n’a jamais eu de soucis là-dessus »
Thylacine :
Il n’y en a pas eu beaucoup… Franchement, au final, on n’a pas supprimé grand-chose du montage… Ah si, on ne m’a pas vu galérer à essayer de chopper l’électricité ! Dans le train, en général, c’est un peu compliqué (rires). Il y avait une prise électrique pour quatre ou cinq personnes donc je la monopolisais un peu… On a essayé de s’arranger à chaque fois.
On a eu aussi une galère pendant une soirée avec des gens et dans certains hotels où l’on avait eu la moitié de ce qu’on avait demandé, mais finalement, c’était assez soft et ça s’est très vite résolu. Pourtant, on transportait des tonnes de matériel qui coûtait très cher et qui auraient pu être une source de gros problèmes, dans les gares notamment, mais on n’a jamais eu de soucis là-dessus. Peut-être même que ça se serait moins bien passé si on avait fait ce parcours dans un autre pays en Europe !
Amnusique :
La Russie n’est donc pas un milieu si hostile ?
Thylacine :
Non, on était assez en confiance là-bas. On peut avoir des préjugés sur la Russie après avoir entendu des choses qui ne font pas trop rêver, alors qu’au final, même si les Russes sont assez rustres au premier abord, parce qu’il n’y a pas de « sourire social » ou de réelles « formules de politesse » comme il peut y avoir chez nous, tout s’est très bien passé.
Amnusique :
Quel était le truc le plus compliquer à gérer durant ces deux semaines ? Gérer un studio mobile ? Les chiottes du train ? Cette pauvre chèvre qui se fait trancher devant tes yeux ?
« J’étais assez motivé pour ne dormir que très peu et repartir le plus vite possible. Je rajoutais même des trucs à faire dans la journée afin de pouvoir me nourrir d’un maximum de choses »
Thylacine :
Ce qui était le plus dur à gérer, c’était la fatigue physique. Je dormais très peu. Chaque fois que je revenais dans le train c’était pour composer non stop, sans trop sortir de ma cabine, sauf pour manger et me balader un peu dans les couloirs. Au bout de deux semaines je commençais à être… totalement épuisé (rires). Il fallait parfois gérer des nuits de seulement deux heures de sommeil avant de partir dans une autre ville. Il fallait que j’aille réveiller l’équipe aussi (rires). Mais ça, c’est parce que j’étais assez motivé pour ne dormir que très peu et repartir le plus vite possible. Je rajoutais même des trucs à faire dans la journée afin de pouvoir me nourrir d’un maximum de choses avant de remonter dans le train. Cette motivation s’explique surement parce que c’est mon projet !
Donc, effectivement, c’était dur ce manque de sommeil. Mais il y avait aussi un certain confort puisque j’étais avec toute une équipe très carrée. Je n’ai pas eu à me soucier des billets de train, des horaires ou de la logistique. C’était l’intérêt du projet que de me concentrer uniquement, pendant deux semaines, sur la composition, la rencontre avec les gens, la découverte de l’inconnu et sur la traduction en musique de toute cette expérience. Il y a toujours quelques soucis techniques à gérer, pour se brancher et pour enregistrer des sons par exemple, mais je n’ai pas à me plaindre, ça s’est plutôt bien passé.
Amnusique :
Question de geek, tu n’avais pas internet dans le train je suppose ?
Thylacine :
Si, j’avais réussi à chopper internet de temps en temps ! On avait des mini-cartes de téléphone prépayées qui nous permettaient de faire quelques posts tous les deux jours. Mais ça restait vraiment très limité comme connexion. Et puis c’était aussi le but que de se couper un peu du monde et juste faire de la musique.
Amnusique :
De manière générale, comment réagissaient les autres voyageurs et les personnes que tu as rencontrés lorsqu’ils te voyaient composer et enregistrer tes morceaux ?
« Au final, il avait tout de même une certaine compréhension [des voyageurs] puisque le Transsiberian est un train mythique »
Thylacine :
Ils étaient un peu curieux mais ça ne les dérangeait pas plus que ça ! Parfois, ils me regardaient et me demandaient ce que je faisais. Surtout lorsque l’on passait dans des gares ! J’étais à fond dans la composition et les gens me voyaient dans la cabine… ça les surprenait un peu (rires). On leur a expliqué le projet mais c’est vrai que ça les intriguait que l’on vienne faire ça ici, chez eux. Au final, il avait tout de même une certaine compréhension puisque le Transsiberian est un train mythique, notamment pour les écrivains, qui permet d’être créatif à l’intérieur. Ce n’était donc pas non plus dénué de sens.
Amnusique :
La pochette et l’univers graphique de cet album sont vraiment superbes. C’est sobre et terriblement efficace ! Tu peux nous parler du créateur de cette pochette ?
Thylacine :
Oui, c’est moi ! (rires)
Amnusique :
Ah ! Je ne savais pas que tu étais également graphiste !
Thylacine :
En fait, je suis d’abord passé par le graphisme avant de faire de la musique électronique. J’en ai beaucoup fait quand je suis rentré aux Beaux Arts, donc j’ai gardé cette facette pour Thylacine. Depuis, c’est toujours moi qui ai réalisé mes pochettes de CD. Pour celle-ci, il y a eu plusieurs étapes mais je suis arrivé à ce choix-là quand je me suis fait tatouer cette ligne sur le corps. J’en avais prévu une autre à l’origine, mais quand j’ai vu ce visuel sur mon bras, je me suis dit que ça ferait une belle pochette pour l’album. C’est venu comme ça.
Amnusique :
On voit d’ailleurs au dos de la pochette les différentes étapes de ton voyage et les morceaux qui y sont associées. Pourquoi avoir fait le choix de mettre les morceaux dans le désordre plutôt que de suivre la chronologie de ton périple ?
Thylacine :
Tout simplement parce que ce n’était pas forcément intéressant d’un point de vue purement musical. Du point de vue du concept, ça aurait pu être sympa de mettre les morceaux dans l’ordre chronologique, mais dans les faits, il y en a plein que j’ai commencé à composer dans un endroit et que j’ai terminés dans un autre. Et puis, musicalement parlant, je pouvais très bien tomber sur deux morceaux qui pouvaient se suivre et, inversement, tomber sur certains dont la logique musicale fonctionnait beaucoup moins bien. Et pour finir, il y a une grosse partie de l’écoute de l’album qui sera faite par le biais du support digital donc ils n’auront pas ce parcours devant les yeux, il faudra donc que ce soit vraiment cohérent musicalement.
Amnusique :
Pour l’habillage musical de la web-série, réalisée par David Ctiborsky, on le rappelle, il y a un mélange entre tes anciens morceaux et ceux composés durant les deux semaines. Est-ce un choix réfléchi de ne pas l’avoir illustrée uniquement avec les titres de l’album ?
« L’idée était de ne pas mettre que des nouveaux morceaux afin de ne pas dévoiler tout l’album dès le début »
Thylacine :
Tout simplement parce que l’idée était de ne pas mettre que des nouveaux morceaux afin de ne pas dévoiler tout l’album dès le début. On a commencé par mettre mes anciens morceaux pour définir le contexte et présenter un peu ma musique à ceux qui ne me connaissaient pas à l’origine. Et puis, au fur et à mesure, en fonction de l’avancée des morceaux pendant le voyage, on en a mélangés de plus en plus.
Amnusique :
Le montage des vidéos s’est fait après ou pendant le voyage ?
Thylacine :
Il y a toujours une petite partie du montage qui se fait pendant. Pendant que je composais, David pouvait déjà commencer à faire des petits tests de montage pour commencer à travailler sur le rythme. Le gros du montage a été fait après, durant tout l’été, pendant que je réalisais le mixage de l’album. On se voyait régulièrement pour finir le montage.
Amnusique :
N’as-tu pas peur de « t’ennuyer » un peu pour tes prochains opus ? Retrouver ton quotidien et ton studio pour composer après avoir vécu une expérience aussi intense…
« Quand tu rentres, tu as un petit choc. Pendant deux semaines, tu as vécu un truc plus fort que pendant tes trois dernières années »
Thylacine :
(rires) ! Justement, le but c’est de pouvoir remonter des projets qui me permettront de ne pas m’ennuyer. Quand le projet fût terminé, je me suis rendu compte qu’il s’était passé un truc très fort en matière de création artistique mais aussi humainement parlant. Il y a eu un vrai dialogue et un vrai échange pendant le projet. Après, c’est vrai, quand tu rentres, tu as un petit choc (rires). Pendant deux semaines, tu as vécu un truc plus fort que pendant tes trois dernières années…
À l’avenir c’est à moi de voir comment je peux continuer dans ce sens-là, sans forcément faire un Transsiberian bis, qui ne serait pas judicieux. Il y a beaucoup de choses qui sont possibles. Pour composer dans un état de découverte, d’échange… il a le voyage, évidemment, mais il a certainement pas mal d’autres choses à faire. Je réfléchis juste à ce que je pourrais envisager. Mais une chose est sûre, je ne vois pas trop m’enfermer dans un studio et composer après ça…
Amnusique :
Ce Transsiberian ne va-t-il pas justement t’obliger à aller encore plus loin pour le prochain album ? Composer pendant un voyage dans l’espace par exemple ?
« Avant de repartir, je veux être sûr d’être aussi motivé et de ne pas m’essouffler en cours de route »
Thylacine :
(Rires) ! Ça, c’est un peu mon rêve, mais bon… pour l’instant c’est hors de portée l’espace (rires) ! J’ai mis énormément d’énergie et de temps dans ce projet Transsiberian. Depuis deux ans, ça m’a pris un temps dingue pour tout organiser. Il y a eu plein de contretemps et de changements (de production par exemple). Ça n’a vraiment pas été simple, voire même hyper compliqué, de motiver les gens… Je vais donc prendre un peu le temps de souffler (rires). Ça m’a beaucoup épuisé. De plus, après le voyage j’ai dû finir l’album dans un délai hyper court, qui plus est en indépendant, donc c’est vrai que c’était une énorme masse de travail. Avant de repartir, je veux être sûr d’être aussi motivé et de ne pas m’essouffler en cours de route.
Amnusique :
Pour reparler du voyage en lui-même, le concert donné le dernier jour était-il quelque chose d’improvisé ou une date prévue à l’avance par tes bookers ?
Thylacine :
Alors non, ce n’était pas prévu à l’avance ! J’avais amené mes machines au cas où. C’était quelque chose que l’on voulait faire mais on n’était pas sûrs du tout de pouvoir le réaliser. On a réussi à mettre ça en place pendant le voyage avec des contacts là-bas. On avait tous envie de clôturer cette expérience par un concert. C’était une bonne idée.
Amnusique :
Avais-tu déjà terminé un morceau de ton album Transsiberian pour le présenter le soir du concert ?
Thylacine :
Non, ça demande pas mal de boulot pour moi de préparer un morceau pour le live. Du coup, l’idée c’était plutôt de s’amuser et de ne pas se mettre une pression supplémentaire avec un nouveau son pour le live. Ça aurait été bien dans l’idée mais… (rires) j’avais suffisamment de boulot pour ne pas rajouter ça en plus.
Amnusique :
Comment es-tu reparti de Vladivostok ? En avion ? En surf (cf : épisode 10) ? Ou t’es-tu retapé 9000 kilomètres de plus en train ?
« J’étais suffisamment lessivé pour ne pas reprendre le train au retour. J’avais pourtant pensé à le faire au début »
Thylacine :
On est repartis en avion directement de Vladivostok en passant par Moscou. On est repartis le lendemain du concert… D’ailleurs, on n’avait pas dormi entre le concert et le départ. C’est normal, on avait envie de profiter à fond pour le dernier jour… (rires). Et puis, il fallait également préparer les bagages donc on a fait une nuit blanche. Quand je suis arrivé sur Paris, j’ai directement enchaîné en partant à La Réunion pour un concert (rires)… Le timing était assez serré ! J’étais suffisamment lessivé pour ne pas reprendre le train au retour (rires). J’avais pourtant pensé à le faire au début, juste faire un aller-retour et de ne pas s’arrêter. Mais, finalement, c’était quand même beaucoup plus intéressant de s’arrêter dans plein de villes et de villages pour rencontrer des gens plutôt que de rester dans le train non stop.
Amnusique :
Tu dis dans le dernier épisode de la série que tu souhaiterais revenir bientôt pour faire écouter ton album à toutes les personnes que tu as rencontrées. Sais-tu si ça va vraiment se faire et quand cela se passera-t-il ?
« J’ai toujours l’envie d’y retourner ! J’ai réussi à faire écouter l’album et à montrer les images à pas mal de personnes qui ont participé. J’ai eu des super retours »
Thylacine :
Je n’ai pas encore prévu de date pour le moment, je galère déjà avec la promotion de l’album et les concerts (rires)… Mais, oui, j’ai toujours l’envie d’y retourner ! J’ai réussi à faire écouter l’album et à montrer les images à pas mal de personnes qui ont participé. J’ai eu des super retours donc c’est chouette. Ce serait bien si j’arrivais à le faire dans les prochains mois. Vers février ou mars. Avant les festivals d’été où mon emploi du temps sera encore plus chargé (rires)…
Amnusique :
Peut-on imaginer que ça donnera lieu à une nouvelle web-série ? « Retour en terre inconnue » ?
Thylacine :
L’idée que j’avais c’était plutôt de repartir et de faire un clip avec les images de retour. C’est à voir… Mon objectif, pour le moment, c’est d’y retourner.
Amnusique :
Question difficile avant de conclure.
Si tu devais ne garder qu’un seul souvenir de ce voyage, lequel serait-il ?
Thylacine :
C’est un peu compliqué… mais je pense que ce serait la journée où on est arrivés à Kazan, quand j’ai rencontré le graffeur et qu’il nous a emmené dans le petit village avec les chanteuses de la chorale. Après, on a passé la soirée avec lui et d’autres personnes. Ce concert n’était absoluement pas prévu et ça a été un moment hyper fort. C’était vraiment de la générosité pure de la part de ces personnes. C’était le premier arrêt de notre voyage donc on se l’est tous un peu pris dans la gueule. À ce moment-là on s’est dit « Ok, ça va être génial pendant tout le voyage ». C’était complètement fou. C’était vraiment le choc le plus fort puisque, après, on a commencé à s’habituer à ce côté insolite. C’est vrai qu’il y a eu des choses énormes qui se sont passées, notamment avec le Chaman, mais si je ne devais garder qu’un seul souvenir, ce serait vraiment celui-là, car c’est le premier.
Amnusique :
Pour terminer, est-ce que tu penses que tu aurais pu faire aboutir ce projet en France avec tous les problèmes que l’on rencontre avec la SNCF ?
« Le fait que le train soit lent était finalement un bon atout pour prendre le temps de découvrir tout ce qui se trouvait autour »
Thylacine :
C’est vrai que dans le Transsiberian on n’a pas eu une seule galère (rires) ! Mais je pense qu’en France on aurait pu quand même en venir à bout aussi (rires). Il faut savoir que le Transsiberian roule entre 50 et 90 km/h maximum, donc le TGV le dépasserait vraiment facilement, même avec 5 heures d’arrêt pour un suicide de loutres ou autres (rires). Mais le fait que le train soit lent était finalement un bon atout pour prendre le temps de découvrir tout ce qui se trouvait autour.
Amnusique :
Merci à toi William d’avoir accepté de répondre à nos questions. On te souhaite plein de bonnes choses pour la suite en espérant que l’album fonctionne bien. On se recontacte pour ton prochain projet dans l’espace alors ?
Thylacine :
(rires) Carrément !
Avec plaisir ! Merci à vous.
Pour retrouver l’intégralité de la web-série, c’est par ici.
L’album Transsiberian est disponible ici :
Itunes – http://apple.co/1RxU0Yo
Deezer – http://bit.ly/1XS39yT
Spotify – http://spoti.fi/1l95kjy
Qobuz – http://bit.ly/1XSskkQ
Pays : France.
Style musical : Electronica, Minimale, Trip Hop.
Nom(s) : William Rezé.
Site web : ici
Maison de disque : Intuitive Records.
Publié par : Guillaume, Catégorie(s) : Artistes, Entretiens
Graphiste et illustrateur dans une agence de communication le jour, administrateur et rédacteur web la nuit, Guillaume est le fondateur du site Amnusique.
Sa plus grande fierté ? Il est Carolomacérien. Sa plus grande honte ? Il a possédé (et écouté) l’album de K-Maro durant son adolescence. L’artiste le plus présent de sa playlist ? Très certainement Parov Stelar.