[REPORT] Le Cabaret Vert 2016
Il faudra s’y habituer, chaque année, c’est la même rengaine ! Après quatre jours de folie passés dans les Ardennes, la routine du quotidien vient reprendre ses droits. Notre esprit ne peut alors s’empêcher de s’inonder des incroyables souvenirs que nous a une nouvelle fois offerts le Cabaret Vert. C’est devenu une tradition, presqu’un rituel sacré, la fin du mois d’août est l’occasion pour nous de nous rendre dans le nord de la France, et plus précisément à Charleville-Mézières, pour assister à son festival de musique, réunissant également écologie, art de rue, bonne bouffe, bande dessinée, cinéma, boisson et cetera. Avec Indochine, Louise Attaque, Sum 41, Block Party ou encore Wolfmother à l’affiche cette année, les organisateurs avaient misé sur un retour aux sources, très orienté rock, qui a su attirer pas moins de 94 000 personnes entre le 25 et le 28 août, soit seulement mille unités de moins que son record historique obtenu en 2014. Amnusique vous résume les temps forts et les points plus décevants de cette édition 2016. L’histoire d’amour continue plus que jamais entre nous et le Cabaret Vert…
Sommaire :
- Une histoire de degrés.
- La sécurité en jeu, on ne joue pas avec la sécurité.
- Un Square Bayard flambant neuf.
- Le régime est mort, vivre le régime.
- Une ambiance toujours au beau fixe.
- Une programmation en demi-teinte.
- Conclusion.
Une histoire de degrés.
« Plus de 35 degrés affichés au thermomètre et pas un nuage qui se profile à l’horizon… »
On n’avait pas vu ça dans les Ardennes depuis l’extinction des dinosaures. Plus de 35 degrés affichés au thermomètre et pas un nuage qui se profile à l’horizon pour nous apporter un peu de fraicheur. De mémoire de festivalier, nous n’avions jamais connu de telles chaleurs au Cabaret Vert. Si les éditions précédentes n’avaient pas nécessité de mesures particulières grâce, ou à cause, de l’apparition quasi systématique de quelques bonnes averses de pluie durant le festival, l’alerte canicule lancée cette année obligeait les organisateurs à mettre en place quelques aménagements bien utiles pour éviter les insolations et la déshydratation. On le sait, l’alcool et la chaleur ne font jamais bon ménage. Nous en avons d’ailleurs fait les frais dès le jeudi avec une belle insolation engendrée à la fois par les rayons écrasants du soleil et par l’absorption de bières locales, bien meilleures, mais, également bien plus fortes que celles produites par les groupes brassicoles internationaux (qui avaient déjà tenté à plusieurs reprises de faire du pied au Cabaret Vert, sans succès). Et oui, nous sommes des petites natures.
« Dans un laps de temps relativement court, les organisateurs ont très bien géré ce risque lié aux fortes chaleurs… »
La météo était claire, le Wild Wild Fest allait être étouffant du début à la fin. Fort de ce constat de dernière minute (quelques jours avant le début du festival, le temps était encore bien incertain), les organisateurs avaient mis les bouchées doubles afin que toute personne foulant le sol du Cabaret Vert puisse s’hydrater convenablement et éviter les accidents bêtes. Bar à eau, bouteilles d’eau et bénévoles munis de pistolets à eau étaient de rigueur pour désaltérer tout ce beau monde. Le Square Bayard et sa verdure luxuriante permettaient également aux festivaliers les plus fragiles de s’abriter quelques instants de ce soleil de plomb. L’organisation avait même eu la bonne idée de déclencher un petit orage de quelques minutes qui a eu le mérite de rafraichir les esprits les plus échaudés avant l’arrivée de Sum 41 ! Pour terminer, les services de secours étaient sur le qui-vive afin d’intervenir le plus rapidement possible en cas d’appel. Dans un laps de temps relativement court, les organisateurs ont très bien géré ce risque lié aux fortes chaleurs. Même si nous n’avons pas de chiffres exacts, il nous a semblé que la Croix Rouge n’avait pas eu à intervenir plus que les années précédentes.
La sécurité en jeu, on ne joue pas avec la sécurité.
« La vie des festivaliers, et, par conséquent, celle du festival, en dépendaient… »
Julien Sauvage, le patron du Cabaret Vert, avait une double pression cette année. Celle de la chaleur, comme évoqué précédemment, mais également, et pas des moindres, celle de la sécurité. Dans une période difficile gangrenée par de multiples attentats, dont certains réalisés dans des lieux culturels, l’enjeu était de taille pour le festival Carolomacérien : garantir une sécurité maximale pour les dizaines de milliers de personnes qui allaient s’amasser sur la plaine de la Macérienne. La vie des festivaliers, et, par conséquent, celle du festival, en dépendaient. On pouvait craindre que la psychose sur un éventuel attentat prenne le pas sur le plaisir mais il n’en fut rien. La peur s’estompait à mesure des pas qui nous amenaient à l’entrée du site. En liens étroits avec la préfecture, les têtes pensantes du FLAP avaient décidé de miser sur un service d’ordre renforcé, visant à surveiller les quatre coins du festival. Les hommes en bleu quadrillaient le secteur aux points stratégiques à l’extérieur du site, en civil à l’intérieur, et des profilers et des snipers avaient également pris de la hauteur afin de surveiller le Square Bayard dans les meilleures conditions possibles. En cas d’attaque d’un forcené, ils étaient les mieux placés pour réagir rapidement.
« La présence policière restait importante mais bien moins étouffante que la chaleur ambiante… »
On le savait, la sécurité serait un élément prédominant cette année, mais, nous n’avons pas ressenti pour autant qu’elle prenait le dessus sur notre liberté de festivaliers. La présence policière restait importante mais bien moins étouffante que la chaleur ambiante. Ils faisaient leur travail, nous faisions notre vie, ils la protégeaient. Julien Sauvage et sa bande avaient prévenu que les contrôles seraient renforcés à l’entrée du Cabaret Vert et que les sacs à dos seraient interdits (ou très fortement déconseillés) pour éviter des fouilles à rallonge engendrant des kilomètres de queue. Les festivaliers grognèrent de cette mesure mais il semblerait que la raison l’ait emporté sur le confort personnel de chacun. Les petits sacs à dos et les bananes remplaçaient ainsi les gros sacs, susceptibles de contenir une arme ou pire, une bombe. Les femmes et hommes en rose de la sécurité semblaient également un peu plus présents sur le site cette année et la fouille à l’entrée demeurait bien plus franche que les éditions précédentes. Pour preuve, Pascal Joly, le Préfet des Ardennes, qui n’avait pas de bracelet pour rentrer, a gentiment été remercié par les agents de sécurité. Un comble ! L’ensemble des bénévoles et des forces de l’ordre peuvent donc maintenant souffler, cette édition 2016 s’est passé sans véritable accroc et nous pouvons les en remercier.
Un Square Bayard flambant neuf.
« Depuis quelques années, Julien Sauvage a fait de l’accueil du public une affaire d’honneur… »
On ne va pas se mentir, la décoration du Cabaret Vert commençait à se faire vieillissante et avait bien besoin d’un bon coup de polish. Après plus de 10 ans passés avec, grosso modo, la même décoration (même si chaque année apportait son lot de petites améliorations), l’édition 2016 marque un véritable tournant dans l’aspect visuel du site de notre si cher Cabaret. Les organisateurs ont ainsi mis les petits plats dans les grands pour optimiser l’accueil de ses 94 000 visiteurs en revoyant totalement la disposition et l’aménagement de plusieurs stands et d’espaces, des scènes des Illuminations et du Temps des Cerises mais aussi en donnant une dimension toute particulière à l’éclairage du site du festival lorsque la nuit fait son apparition. L’aspect décoratif du Cabaret Vert n’était presque qu’accessoire pour nous auparavant, dorénavant, elle sera un élément quasiment aussi important que l’aspect musical, alimentaire et écologique qui s’y jouent durant quatre jours. Depuis quelques années, Julien Sauvage a fait de l’accueil du public une affaire d’honneur, mais, celui-ci prend encore plus son sens cette année.
« Il y a beaucoup a dire sur les améliorations apportées à la plaine de la Macérienne… »
Outre les aménagements de circulation qui ont permis de désengorger énormément de points sur le festival (il faut le reconnaitre, il y a très peu de queue lors de la récupération des bracelets, lors des fouilles – mis à part peut-être le premier jour – juste avant l’arrivée sur la petite scène, et, relativement peu d’attente sur les différents stands – sauf ceux victimes de leur succès – de bouffe et de boisson.), ce qui saute aux yeux cette année c’est le soin tout particulier apporté à la décoration. Il est loin le temps des bidouillages, des coups de pinceau hâtifs sur de vieilles planches de bois usés par le temps et de la technique Mac Giver pour faire tenir la signalétique. Le Cabaret Vert a gagné en réputation depuis sa création en 2006 et se devait également aujourd’hui de retransmettre cette image positive par le biais de l’aménagement de son univers. Il y a beaucoup a dire sur les améliorations apportées à la plaine de la Macérienne cette année mais nous la résumerons en cinq grands points – d’ordre visuel et pratique – principaux.
« Le bar voisin de la petite scène et du Temps des Cerises a bénéficié d’un sacré lifting… »
Le premier nous vient tout droit du stand de boisson appelé « Le Groin-Groin ». Cet antre de la bière, qui a accueilli bon nombre de beuveries mémorables, est celui qui a sans nul doute connu la métamorphose la plus éloquente. Le bar voisin de la petite scène et du Temps des Cerises a bénéficié d’un sacré lifting, orchestré de main de maître par une talentueuse équipe que l’on dirait tout droit sortie du HellFest. Fortifié grâce à plusieurs plaques de tôle issues de la récupération, le bar à bières se distingue des ses frères et sœurs de par ses immenses trônes faits d’os et de bois qui culminent fièrement à plusieurs mètres au-dessus des tireuses à mousses, ainsi qu’à ses flambeaux chatoyants qui s’embrasent au moindre signe d’obscurité. Le thème très « metalleux » a été poussé à l’extrême, jusqu’à accueillir une réplique de chaise électrique grandeur nature qui vient se mêler merveilleusement aux notes explosives des morceaux de System Of A Down qui défilent dans les enceintes du bar. Mais, heureusement, au Groin-Groin il n’y a pas que du métal ! Vous pourrez aussi bien vous trémousser sur du Too Many Zooz que sur The Real Slim Shady (Please Stand Up) d’Eminem tout en sirotant votre bière. Le nez de sanglier au carré se révèle un peu plus comme l’un des lieux incontournables du festival. On adore.
« Dans l’esprit de beaucoup de gens, Le Temps des Cerises était un peu la « No Go Zones » du Cabaret Vert… »
Le Temps des Cerises était le deuxième très gros chantier du Cabaret Vert cette année. Depuis sa création, cette zone s’était peu à peu transformée en un véritable repaire de teufeurs invétérés et des adeptes des bières spéciales Ardennaises servies à son comptoir. Élaboré à l’ombre de quelques arbres, ce lieu un peu à part faisait, jusque-là, davantage office de scène alternative pour les déçus de Zanzibar et des Illuminations, que d’un authentique espace de rassemblement pour la majorité des festivaliers. Ce qui lui faisait défaut ? Certainement sa superficie et son aménagement bien trop étriqués qui en décourageaient plus d’un. Et puis, il faut bien l’avouer, dans l’esprit de beaucoup de gens, Le Temps des Cerises était un peu la « No Go Zones » du Cabaret Vert. La tanière idéale des dreadlocks et des fumeurs de joints. Aujourd’hui, ces idées caricaturales sont bien loin derrière nous, grâce à l’arrangement de la zone, aux petits oignons confit, concoctée par les organisateurs du Cab.
« Nous n’avions jamais passé autant de temps au Temps des Cerises que cette année… »
En effet, pour cette édition 2016, le TDC a poussé ses murs boisés afin d’accueillir un public beaucoup plus important qu’à l’accoutumée, et, ainsi, lui offrir une piste de danse encore plus vaste. Afin de faciliter l’accès à cette troisième scène atypique, le système de « portes d’entrée » a tout bonnement été supprimé pour laisser place à de multiples ouvertures permettant un trafic fluide et continu. Le pari est réussi puisque nous n’avions jamais passé autant de temps au Temps des Cerises que cette année. Les immenses lettres végétales exposées sur le parvis de la zone ont sans doute éveillé la curiosité de plus d’un festivalier qui ont également dû franchir le pas et tenter l’expérience de cette scène alternative, et ce, de bon cœur. Seules petites ombres au tableau, l’attente souvent interminable à la buvette qui nous a poussé à aller chercher notre bière au Groin-Groin pour éviter la queue; mais aussi l’éloignement entre la scène (très excentrée) et les enceintes, qui fût vraiment perturbant et désorientant. Ne pas voir l’artiste (on pense notamment à Dabeull) lors de son set peut être vraiment déroutant. Un principe de boiler room ne serait-il pas une bonne option pour le futur ? C’est à creuser.
« Ce paradis des gourmets et des gourmands s’est vu offrir un costume tout neuf… »
Autre point incontournable du Cabaret Vert qui a connu une cure de jouvence, c’est le Square Alternatif, rebaptisé pour l’occasion « Bayard Square Garden ». À quelques encablures de la grande scène, ce paradis des gourmets et des gourmands s’est vu offrir un costume tout neuf fait d’une multitude de cubes alternant entre bois brut, planches sculptées et panneaux colorés. Les enseignes des différents stands particulièrement soignées et les planchers qui jonchent le sol participent à cette ambiance à mi-chemin entre Tetris et les villages fantômes traversés par Lucky Luke. Auparavant, il était parfois difficile de trouver une place pour s’assoir et déguster un bon repas, les organisateurs ont résolu ce problème en y ajoutant bon nombre de tables tout au long du cours d’eau qui caresse les fortifications, une terrasse très spacieuse et ultra-conviviale pour se réunir entre amis, et des sièges réalisés en bobines de câbles et en palettes, idéals pour faire une petite pause confortablement assis (ces sièges étaient auparavant utilisés par les bénévoles dans leur espace dédié).
Le Cabaret Vert a aussi pensé aux artistes en herbe en prenant le soin de disposer plusieurs tableaux noirs et des craies pour que les festivaliers puissent laisser libre cours à leur créativité. Autant vous dire qu’il n’y avait plus un espace noir disponible au bout de seulement quelques heures de festival. Julien Sauvage a laissé entendre que cet espace pourrait encore évoluer dans les éditions à venir et qu’il n’était pas encore à son optimisation maximum. Ça laisse rêveur !
« Cette boutique n’avait jusqu’à-présent jamais vraiment brillé à nos yeux, du fait de son apparence tout sauf glamour… »
Un lieu plutôt inhabituel, au sein duquel le passage des individus n’est qu’éphémère durant les quatre jours du festival, a lui aussi connu quelques changements notables qui ne sont pas pour nous déplaire ! Non, nous ne parlons pas des toilettes sèches ni du centre de secours, mais bien de la boutique officielle du Cabaret Vert, autrement appelée « Stand Merchandising ». Autrefois accouplée au point de rechargement des téléphones mobiles, cette boutique n’avait jusqu’à présent jamais vraiment brillé à nos yeux, du fait de son apparence tout sauf glamour (une immense tonnelle blanche) et de ses produits qui manquaient clairement d’originalité. Heureusement, tout a été remis à zéro cette année. « Le Merch » a enfin pu retrouver ses lettres de noblesse en troquant sa tonnelle impersonnelle contre deux gigantesques tipis et un comptoir de bois, plus que jamais ancrés dans le thème du Wild Wild Fest.
« Les t-shirts, marcels et lunettes de soleil édition 2016 ont réalisé un véritable carton en termes de ventes… »
La gamme de vêtements vendus sur le stand a elle aussi été totalement repensée afin de proposer, aux festivaliers de tous âges, des produits plus « tendances » qu’on pourrait arborer bien plus facilement dans la vie de tous les jours. L’objectif évident était de casser avec l’esprit « boutique de souvenirs » et ses t-shirts affreux qu’on ne porte qu’en guise de pyjama. Si les ponchos ont souffert de la chaleur cette année, les t-shirts, marcels et lunettes de soleil édition 2016 ont en revanche réalisé un véritable carton en matière de ventes. Une belle idée à souligner également pour les collectionneurs de vinyles, celle du retour du disque à microsillons sur les rayons de la boutique, permettant de faire un petit coup de projecteur sur les artistes locaux programmés cette année (Judy, Paulette Wright, Grand Morse, We Are Shadows…). Depuis notre achat, le morceau « In The Dark » des Rémois de Judy résonne désormais en boucle sur notre lecteur vinyles.
« Le Cabaret Vert commence vraiment à avoir de la gueule aux premières lueurs du crépuscule… »
Pour en conclure avec l’aspect décoratif, nous allons aborder un dernier point, celui qui ne se distingue pas le jour mais qui prend tout son sens à la tombée de la nuit : celui des illuminations du festival. Et là, il faut être honnête, le Cabaret Vert commence vraiment à avoir de la gueule aux premières lueurs du crépuscule ! Toujours soucieux de préserver l’environnement, les organisateurs ont développé un système d’éclairage qui allie beauté et faible consommation d’énergie. Du Temps des Cerises, Aux Temps des Freaks, en passant par l’arrière de la scène des Illuminations, les lueurs colorées dissimulées un peu partout dans les arbres viennent apporter un côté féérique indéniable au Cab. N’en déplaise à Rimbaud, Charleville-Mézières n’a plus rien de laid.
Le régime est mort, vive le régime.
« Ce n’est pas une nouvelle, on boit bien et on mange bien au Cabaret Vert… »
Parler du Cabaret Vert sans évoquer notre prise de poids constante durant ces quatre jours de festival serait sans doute une faute professionnelle ! La manifestation Ardennaise fait sans doute partie des seuls événements du genre où les repas se font à intervalles très réguliers, généralement toutes les heures, avec une petite pause réservée aux bières, organisée entre chaque collation. En même temps, comment résister à ces croque-monsieurs au Maroilles qui nous font les yeux doux (en tentant de braver les 3/4 d’heures de queue allez-vous me dire ?), à l’odeur de ces bonnes frites fraîches maisons produites non loin de la petite scène (ne prenez pas celles en dessous de l’espace VIP, c’est de l’arnaque), aux crêpes au boudin blanc et oignons confits ou bien aux calories toutes mignonnes de l’assiette de charcuterie Ardennaise du Bayard Square Garden ? Impossible.
On ne reviendra pas non plus sur l’éventail de bières disponibles absolument colossal, qui contentera les fans inconditionnels de mousses Belges, ni sur les mets régionaux typiques comme la Cacasse à Cul Nu ou la Salade Au Lard qui sont rentrées dans les mœurs de la majorité des festivaliers passés au moins une fois par Charleville-Mézières. Ce n’est pas une nouvelle, on boit bien et on mange bien au Cabaret Vert !
Une ambiance toujours au beau fixe.
« Le festival est clairement devenu l’événement de l’année pour des milliers d’Ardennais… »
Une autre des spécificités cruciales du Cabaret Vert qu’il est important d’évoquer, c’est cette atmosphère bon enfant qui y règne depuis tant d’années et qui semble se transmettre à travers les éditions et les générations. Les parents qui ont vécu les premiers Cabarets Verts voient aujourd’hui leurs enfants se l’approprier avec la même passion, le même engouement et la même joie qui étaient les leurs il y a 11 ans de cela. Le festival est clairement devenu l’événement de l’année pour des milliers d’Ardennais, mais il l’est également devenu pour bon nombre de Français des six coins de l’hexagone, de Belges ou encore de Hollandais. Alors, certes, sur les 94 000 personnes participant à cette grande fête, on pourrait toujours bêtement s’efforcer de trouver quelques énergumènes isolés susceptibles de venir la gâcher – pour tout un tas de raisons – mais, c’est un fait, la majorité des gens qui viennent ici est épicurienne. Elle vient avant tout pour profiter des jours et des nuits si particulières concoctées avec brio par les 1800 bénévoles mobilisés cette année.
« La programmation a sans doute attiré un public plus âgé qu’à l’accoutumée mais l’alchimie semble s’être créée tout naturellement avec les plus jeunes… »
Ce festival a un don exceptionnel, celui de rassembler les populations et de faire tomber toutes les barrières, qu’elles soient sociales ou culturelles. Au Cabaret Vert, vous pourriez aussi bien tomber sur votre banquier en tenue décontractée que sur votre professeur de CE2 sirotant une bière au Bâteau Ivre. Vous pourriez croiser un inconnu de cinquante ans qui vous montre ses attributs devant sa femme, un brin gênée, ou bien des trentenaires des quartiers réputés sensibles de Charleville qui se trémoussent devant Dabeull, leur « coup de cœur » de cette année (tout est véridique). Au Cabaret Vert, vous pourriez aussi bien côtoyer des personnes à mobilité réduite que des marcheurs comme Yohann Diniz venant voir Paulette Wright. Vous pourriez croiser des familles nombreuses et des vieux garçons, des révolutionnaires et des maires de droite, des jeunes déguisés et des agents de sécurité habillés de rose… Bref, vous pourriez même croiser Kyan Khojandi (cf : édition 2015). Il y a de tout, du n’importe qui, du n’importe quoi au Cabaret Vert et c’est certainement pour cela qu’on l’aime autant.
Cet événement brasse un public tellement éclectique que l’on pourrait avoir des craintes sur la confrontation de toutes ces différences, alors qu’en définitive, c’est cette diversité qui fait sa grande force. Au même titre que ses différents styles musicaux et ses services proposés. L’ambiance cette année a été une nouvelle fois excellente et les quelques cons de l’année dernière et de l’année prochaine (dédicace à Patrick Timsit) semblaient avoir pris des vacances bien loin des Ardennes. La programmation a sans doute attiré un public plus âgé (Indochine, Louise Attaque, Arno…) qu’à l’accoutumée mais l’alchimie semble s’être créée tout naturellement avec les plus jeunes. Si les déguisements ont été un peu revus à la baisse par rapport aux éditions précédentes (les fouilles en ont sûrement dissuadé plus d’un), le drapeau Breton a fort heureusement redressé la barre en faisant son grand retour à Charleville-Mézières.
« Nous avons pu participer à une partie de beach voley endiablée, en plein milieu d’une allée, avec le sosie de Michel Polnareff… »
Nous avons également pu mesurer la température du camping, qui semble beaucoup plus calme que d’habitude, mais, qui accueille toujours son lot des fous à lier. C’est mathématique, plus le camping est grand et moins il y a de chance pour que les plus dingues des campeurs se retrouvent dans la même zone. À notre grande surprise, nous avons pu observer une première partie du Dormeur du val (camping des fêtards) totalement amorphe alors qu’habituellement, cet emplacement nous mettait directement dans le bain de cet « after des concerts » du Cabaret Vert. Il fallait approcher de l’espace cantine pour enfin distinguer les premiers signes de vie et entendre les premières notes de musique résonner. C’est seulement à ce moment que l’on a retrouvé l’esprit du camping qui nous plaisait tant depuis le début.
Déambuler dans les zones du Dormeur du val amène régulièrement son assortiment de rencontres loufoques, d’apéros improvisés et de scènes surréalistes. Ainsi, à 4h du matin, nous avons pu participer à une partie de « beach voley » endiablée, en plein milieu d’une allée, avec le sosie de Michel Polnareff en Guest Star. Chaque point gagné par l’une ou l’autre des deux équipes (composées d’une vingtaine de personnes, évidemment) donnait lieu à « on est en finale » repris à tue-tête. Il n’y a vraiment qu’au camping que l’on peut voir ça. L’asile rouvrira ses portes dans un peu plus de 300 jours et nous en serons !
Une programmation en demi-teinte.
« Pas vraiment mauvaise mais loin d’être exceptionnelle, cette programmation a manqué de piquant dans sa globalité… »
Depuis notre première fois au Cabaret Vert en 2008, une constatation revenait régulièrement lorsqu’une personne qui ne connaissait pas le festival nous demandait de lui en parler brièvement. Ce constat était le suivant : « même si la programmation du Cabaret Vert devenait médiocre, nous continuerions tout de même d’y participer car celui-ci va bien au-delà de l’aspect musical ». Cette phrase ne s’est jamais autant vérifiée que lors de l’édition 2016 du festival Ardennais, non pas parce que la line-up concoctée par Christian Allex nous paraissait aberrante, mais, tout simplement, parce que celle-ci ne nous faisait pas vraiment rêver.
Même si ce n’est pas forcément un gage de qualité, contrairement aux éditions précédentes, il y avait beaucoup d’artistes que nous ne connaissions pas, ou très peu, certainement du fait de leur caractère très rock, qui n’est pas notre musique de prédilection. Alors, en bon festivaliers qui se respectent, nous avions tout de même écouté trois ou quatre des morceaux les plus connus de chacun des groupes programmés à ce Wild Wild Fest. Et si notre première impression sur la line-up générale n’avait pas été excellente, les quelques écoutes des artistes qui nous étaient jusque-là inconnus nous laissaient vraiment présager de bonnes choses. Peut-être même l’une des meilleures éditions que l’on ait connues. Fallait-il encore que ces belles promesses soient confirmées en live.
Et c’est peut-être finalement là que le bât a blessé. Cette édition 2016 du Cabaret Vert s’est conclue le dimanche 28 août par un petit goût d’inachevé côté musical. Pas vraiment mauvaise mais loin d’être exceptionnelle, cette programmation a manqué de piquant dans sa globalité. Ce qui est agréable à écouter chez soi ou dans une petite salle de concert ne l’est pas toujours sur une scène de festival, plus grande et impersonnelle ! Sur toutes les prestations auxquelles nous avons pu assister durant ces quatre jours, peu sont finalement sorties du lot. L’ensemble nous est paru assez moyen, parfois terne et l’électrochoc rock annoncé n’a pas eu lieu. Christian Allex avait révélé au journal L’Union que les artistes à l’affiche étaient tous ses coups de cœur, il s’est avéré qu’ils n’ont pas été les nôtres. Des têtes d’affiche décevantes et vieillissantes aux belles surprises, voici une liste de ce que le Cabaret Vert a offert de meilleur et de moins bon durant ces quatre jours.
On a (quand même) aimé :
– Le show à l’Américaine des Sum 41 qui a réveillé notre âme d’adolescent
– Ré-entendre les classiques du Hip-Hop de Nas
– L’ouverture du festival par les excellents Higly Suspect
– Le scénographie somptueuse de Nekfeu
– La sortie de scène improbable de Jacques (sur les mains)
– Entendre retentir le célèbre Woman De Wolfmother
– Les quelques minutes passées devant le rock/pop de Grand Morse
– La conclusion en beauté de Breakbot qui prouve que l’électro a bien changé
– La dernière partie bien dansante du concert de Cassius
– L’univers musical de Club Cheval
– La maturité du jeune Jake Bugg
– La montée en puissance du set Funky de Dabeull
– La fraicheur de l’électro-pop de Judy
– Détester le chanteur de Feu! Chatterton (et son phrasé à mi-chemin entre Saez et Brel)
– Le franc-parlé de The Inspector Cluzo
– La voix si particulière de Soom-T
– Apprendre que Darius (Roche Musique) avait été approché cette année et qu’il sera vraisemblablement de la partie en 2017
On a moins aimé :
– Qu’on ne remplace pas un groupe annulé (Sharon Jones And The Dap-Kings)
– Avoir Dabeull, Club Cheval et Bloc Party jouer sur la même plage horaire
– Les chansons de The Inspector Cluzo
– Les mégalos d’Indochine
– Bibi Bourelly qui ne fait que 20 minutes de concert au lieu des 50 minutes prévues
– Les morceaux de Nekfeu (là, il y a débat à la rédac)
– Le côté beaucoup trop répétitif des morceaux de Louise Attaque
– Les expérimentations de Jacques moins percutantes sur une scène de festival que dans une petite salle de concert
– La fin du concert de Cassius alors qu’on commençait tout juste à s’ambiancer
– Les style entre Amadou & Mariam et Tinariwen des Songhoy Blues
– Le manque d’énergie des musiciennes de Soom T
– Que Dabeull ne soit pas programmé sur la scène des Illuminations
– Les instrus à la « Magic System » de MHD
– Les claquettes de MHD
– La voix cassée d’Arno qui nous casse les oreilles
– Les mimiques du chanteur de Feu! Chatterton et ses textes incompréhensibles
– La voix plaintive de la chanteuse de Grand Blanc
– Louper Anderson Paak, Seratones et Black Bones
Conclusion :
« Le festival est clairement monté en gamme cette année.… »
Malgré une programmation musicale un peu en deçà des éditions précédentes (selon nous), le Cabaret Vert a su nous régaler sur une multitude d’autres points. Julien Sauvage et sa bande ont travaillé d’arrache-pied pour nous proposer cette bulle de verdure et d’allégresse hors du temps et des préoccupations du quotidien, située en plein cœur de la ville de Charleville-Mézières. Le festival est clairement monté en gamme cette année en proposant aux visiteurs une décoration des plus léchées, un aménagement du site optimisé et un éclairage nocturne somptueux. Conscients des menaces qui planaient actuellement sur l’hexagone, les organisateurs ont également mis tout en œuvre pour assurer la sécurité des festivaliers sans jamais les asphyxier.
Durant quatre jours intensifs et sous un soleil de plomb plutôt inhabituel pour les Ardennes, nous avons une nouvelle fois pu jouir sereinement des plaisirs simples de la vie que nous offre le Flap depuis maintenant 11 ans. Pouvoir manger, rire, boire, danser, s’extasier, s’évader – mais aussi détester – sans jamais se soucier du lendemain, c’est finalement ça l’esprit du Cabaret Vert. Il y a tant de choses à vivre aux quatre coins de ce Square Bayard que l’on se dit que la musique n’est finalement qu’un fabuleux prétexte. Que la programmation soit à notre goût ou non, nous reviendrons avec tout autant de plaisir l’année prochaine, et c’est bien là que réside l’essentiel •
Crédits Photos : ©Cabaret Vert & Darkroom
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Publié par : Guillaume, Catégorie(s) : Analyses et reportings, Festivals
Graphiste et illustrateur dans une agence de communication le jour, administrateur et rédacteur web la nuit, Guillaume est le fondateur du site Amnusique.
Sa plus grande fierté ? Il est Carolomacérien. Sa plus grande honte ? Il a possédé (et écouté) l’album de K-Maro durant son adolescence. L’artiste le plus présent de sa playlist ? Très certainement Parov Stelar.
Merci pour cette belle parenthèse sur le GROIN GROIN. Arnaud carolomacerien aussi et aussi fière de l’être.